06/07/2016

Les militaires italiens au pas de l’open source

Depuis plusieurs années, un nombre croissant d’organismes publics italiens ont fait le choix de remplacer les logiciels propriétaires par des solutions open source. C’est au tour des forces armées italiennes qui amorcent actuellement la migration de plus de 100 000 postes bureautiques de Microsoft Office vers LibreOffice.

Une ampleur sans précédent

Les initiatives italiennes en faveur de l’open source étaient jusqu’à présent plutôt locales, mais grâce au ministère de la Défense italienne, l’échelle des décisions est remontée jusqu’au niveau de l’état avec la migration de 5000 machines depuis le début de l’année 2016. Les forces terrestres navales et aériennes sont concernées par cette mutation qui pourrait à terme représenter près de 100 000 machines. C’est la plus grande migration effectuée à ce jour dans le pays. Le projet pourrait devenir le second plus grand switch d’un pays européen vers la suite bureautique. En toute cohérence, l’armée italienne a décidé de donner le statut de format par défaut au format ouvert ODF pour les communications entre les différents départements de l’organisation.

Des économies substantielles

Selon le ministère de la Défense, la transition s’étalant sur quatre années permettra de réaliser entre 26 millions et 29 millions d’euros d’économie, qui seront investis dans la mise à jour et la remise à plat du progiciel de gestion intégré de la défense italienne.

« Nous planifions la migration de près de 75 000 ordinateurs d’ici 2017 et 25 000 de plus d’ici 2020 » annonce le général Camillo Sileo, qui supervise le projet dénommé LibreDifesa. Ces jalons du projet sont dictés par l’expiration des licences actuelles de Microsoft Office. La situation actuelle au sein des différents départements du ministère de la Défense est d’ailleurs très hétérogène avec de multiples versions de la suite bureautique propriétaire. Certaines, particulièrement anciennes, ont un impact négatif avéré sur les tâches quotidiennes du personnel et sur la gestion des systèmes informatiques.

Pour rendre la transition vers l’open source la plus douce possible, plus de 25 séminaires ont été organisés pour les managers et les cadres des trois armes par le projet LibreDifesa entre octobre et décembre 2015 pour les informer sur les tenants et aboutissants de la migration. Parallèlement, le ministère a réalisé un sondage pour déterminer comment les employés utilisent leur suite bureautique au quotidien et avec quels autres logiciels ils interagissent. Les résultats ont démontré que seulement 20 % du personnel utilise PowerPoint, 15 % utilisent PowerPoint et Excel et moins de 2 % déclarent utiliser la base de données Access de Microsoft. Ces résultats ont prouvé leur efficacité dans l’élaboration d’un planning de migration et la mise à jour de certains programmes, selon le ministère.

« Jusque là, nous n’avons rencontré aucun problème particulier, ce qui démontre que le passage vers la suite bureautique open source LibreOffice est moins difficile que l’on croit le plus souvent et qu’il n’y a pas résistance au changement des équipes quand [la transition] est gérée correctement » commente le général Sileo.

En collaboration avec la société civile

Le ministère de la Défense travaille aussi pour s’assurer que les autres administrations puissent bénéficier de son expérience. Ainsi, les documents du projet LibreDifesa seront accompagnés d’un cours en ligne sous licence Creative Commons pour aider les employés à se former à leurs nouveaux outils de productivité. Le cours a été développé avec l’aide de LibreItalia, une organisation à but non lucratif dédiée à la promotion de LibreOffice. LibreItalia qui a signé un protocole d’entente avec le ministère de la Défense en septembre dernier a collaboré à l’élaboration du plan de migration et à la phase de démarrage du projet, se reposant principalement sur le protocole de migration LibreOfficeédité par laDocument Foundation.L’organisation a formé près de 30 personnes pour qu’elles deviennent à leur tour des évangélistes LibreOffice au sein de l’organisationet continue à apporter l’encadrement nécessaire quand ces derniers doivent apporter un support aux nouveaux utilisateurs.L’action des membres de LibreItalia est bénévole, ce qui a permis au ministère de réaliser d’autres économies.

Un coût de migration quasi nul

Le ministère annonce que le coût de la migration ne devrait pas excéder les défraiements de bénévoles pour l’organisation à l’exception de l’investissement dans le gestionnaire de document, pour lui donner la capacité à lire les documents au format ODF, soit 45 000 €. En comparaison de la taille du projet, les partisans de l’open source voient dans cette décision une opportunité pour le destin futur des logiciels propriétaires dans le secteur public italien.

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